On entend souvent parler de l’éducation à l’écran.

C’est comme la voiture : il y a ceux qui l’utilisent parce qu’ils doivent vraiment se déplacer, il y a ceux qui aiment l’objet et le personnalisent de façon parfois très originale, puis il y a ceux qui prennent du plaisir dans l’usage (accélération, confort…).
En usage d’écran, on a la même typologie : ceux qui allument la télé ou l’ordi pour répondre à un besoin (détente, recherche d’information, envoi d’un message…), ceux qui aiment la qualité de l’appareil, et ceux qui prennent plaisir dans son usage.

Dépendance ou saine curiosité ?

Dans ma classe de CP, notamment avec l’utilisation de Twitter pour lire et pour écrire, c’est un peu difficile en début d’année de ne pas lancer une dépendance ; lorsqu’un tweet arrive (message d’une autre classe, ou réponse à nos tweets), un signal sonore retentit. En début d’année, à chaque « twbip », les élèves veulent absolument lire le message dans l’instant. C’est dans l’usage que je leur apprends à reléguer leur curiosité à plus tard. Ils comprennent vite que le message reste sur notre « mur », et qu’il peut être consulté 3 minutes plus tard, ou même le lendemain.

Parfois, ce report va même plus loin. A force de prendre l’habitude de ne pas se jeter sur Twitter au premier signal, on en vient parfois à l’oublier lorsque les dictées et les lignes de calculs sont tellement prenantes ! Pour alimenter l’envie d’écrire et la motivation de lire, il me faut trouver un juste milieu en consacrant quelques temps collectifs à la lecture des messages, ou en laissant un ordi allumé pour ceux qui souhaitent aller voir ce qu’il s’y passe.

Sur un angle de vue plus large que celui des simples tweets, je constate que l’écran devient vraiment un outil parmi d’autres. Cette année, mes élèves me surprennent à aller chercher un ordi, non pour tweeter ou pour jouer, mais pour chercher sur Google l’orthographe d’un mot, la description d’un animal ou la couleur des voiles d’un bateau du Vendée Globe.

 

L’écran, outil naturel

L’anecdote : Laura voulait écrire « Cap Horn »… mais ne connaissait pas la bonne orthographe (première victoire, les enfants se soucient de l’orthographe car savent qu’un message va être diffusé). Alors que la solution était sur une carte murale pour suivre la course, Laura a préféré regarder sur la tablette, en allant sur le site du Vendée Globe, pour trouver l’orthographe exacte du cap, et regarder au passage le classement des skippers. Elle ne m’a rien demandé, rien dit, et n’a même pas pensé, je pense, à se référer à la carte murale.

Est-ce à dire qu’elle devient escalve aux écrans ? Qu’il lui faut une éducation pour apprendre à regarder d’abord une carte, un dictionnaire, avant de chercher une information sur un écran ?

Je dis clairement non. Le dictionnaire ou l’affiche de la classe, elle ne l’aura pas constamment avec elle dans sa vie future. Alors que le Net, si. J’ose au moins croire quelques années… Les habitudes de recours à l’écran qu’on insuffle dès la Maternelle ne sont pas les prémices d’une dépendance à l’écran, mais juste l’occasion d’éduquer aux bons usages de ceux-ci : esprit critique, qualification des sources, éthique et sécurité du surf, etc.

 

Dépendant à la culture

Il y a 25 ans, quand j’étais à leur place, nous avions les mêmes réflexes : certains se jetaient sur les dictionnaires ou les encyclopédies pour trouver des informations nécessaires au travail de classe, d’autres attendaient que les premiers le fassent puis s’y mettaient un peu à la fois, et enfin les autres profitaient simplement de la chaleur du radiateur. Se plaignait-on alors que des élèves aillent trop consulter le dictionnaire ?

Bien-sûr, vous allez me dire que le problème est qu’on passe trop de temps devant l’écran quand on est enfant. La recherche d’information, c’est bien, ça cultive, mais le jeu vidéo, les séries américaines et les dessins animés, ça ne semble pas être très utile. Mais n’est-ce pas simplement une détente ? Là où nous passions des heures dans le jardin à se construire des cabanes, à faire du vélo ou à jouer au foot, les enfants d’aujourd’hui se détendent autrement devant l’écran.

Alors effectivement, sur ce point, une éducation à la santé est nécessaire : il est meilleur pour le corps de faire une bonne partie de foot dans l’herbe que de cliquer nerveusement sur sa manette de « Fifa2013″ (même si je ne nie pas les apprentissages permis grâce à l’utilisation fréquente des jeux vidéo).

Et si finalement, l’éducation aux écrans, c’était simplement d’apprendre aux enfants à les utiliser quand on en a besoin ?


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Image Mike Licht, cc

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